Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/61

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Nous disons : tous les illettrés sont également ignorants, pour nous ce sont des Scythes. Pour commencer l’instruction, la lecture et l’écriture sont nécessaires et, volens nolens, par cette voie nous entraînons le peuple dans notre instruction. Pour moi, avec l’instruction que je possède, il me serait très agréable d’être de cet avis. Je suis même convaincu que la lecture et l’écriture sont les conditions nécessaires d’un certain degré d’instruction, mais je ne puis être certain que mon instruction est bonne, que la voie dans laquelle marche la science est sûre et, principalement, je ne puis laisser de côté les trois quarts du genre humain, qui sont instruits sans savoir lire et écrire. Si nous voulons instruire le peuple coûte que coûte, demandons-lui comment il s’instruit et quels sont pour cela ses moyens préférés. Si nous voulons trouver le premier degré de l’instruction, alors pourquoi devons-nous le chercher absolument dans la lecture et l’écriture et non beaucoup plus loin ? Pourquoi s’arrêter à l’un des innombrables moyens d’instruction et y voir l’alpha et l’oméga de l’instruction, tandis que ce n’est qu’une des conditions fortuites de l’instruction ? En Europe on apprend à lire et à écrire depuis longtemps, et, cependant, il n’existe pas de littérature populaire, c’est-à-dire que le peuple, — la classe exclusivement occupée du travail physique — nulle part ne lit de livres.

Ce phénomène semblerait mériter l’attention et