Aller au contenu

Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol18.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait de la terre une conception toute particulière lui appartenant en propre. Pour renforcer cette assertion, il se hâta d’ajouter qu’à son avis cette opinion du peuple russe découlait de la conscience de sa vocation qui est de peupler les immenses solitudes de l’Orient.

— Il est facile de tomber dans l’erreur en concluant de la destination générale du peuple, objecta Métrov, interrompant Lévine. La situation de l’ouvrier dépend toujours de son rapport envers la terre et le capital.

Et sans laisser à Lévine le temps d’achever sa pensée, Métrov commença à lui exposer l’originalité de ses théories.

En quoi consistait cette originalité, Lévine ne le comprit point, car il ne se donna pas la peine de le comprendre. Il voyait que Métrov, comme les autres, malgré son article dans lequel il critiquait la doctrine des économistes, envisageait néanmoins la situation de l’ouvrier russe exclusivement au point de vue du capital, du salaire, de la rente. Bien qu’il dût avouer que dans la plus grande partie de la Russie d’Orient la rente fût encore nulle, que le salaire, pour les neuf dixièmes du peuple russe, pour quatre-vingt-dix millions d’êtres, s’exprimât uniquement par la nourriture, et que le capital n’existât que sous les formes les plus primitives, néanmoins, il n’examinait l’ouvrier que de ce seul point de vue ; divergeant sur quelques