Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol3.djvu/156

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vieux s’arrêta de nouveau et montra une branche couchée en travers de la route.

— Que penses-tu que ce soit ? — dit-il. — Tu crois que c’est comme ça ? Non, c’est mal que cette branche soit ainsi.

— Pourquoi est-ce mal ?

Il sourit.

— Tu ne sais rien, écoute. Quand la branche est comme ça, en travers de la route, ne l’enjambe pas, mais fais un détour ou rejette-la de la route et dis la prière : « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit », et alors marche, il ne t’arrivera rien. Voilà ce que les vieux m’ont appris.

— Mais quelle bêtise ! — dit Olénine. — Parle-moi plutôt de Marianka, quoi, a-t-elle une liaison avec Loukachka ?

— Chut, maintenant tais-toi ! — l’interrompit le vieux en chuchotant. — Écoute seulement. Nous traversons la forêt. Et le vieux, en marchant doucement dans ses porchni, alla devant par les sentiers étroits qui entraient dans la forêt épaisse, sauvage.

Parfois, en fronçant les sourcils, il se tournait vers Olénine qui faisait du bruit avec ses grandes bottes, ou qui tenant mal son fusil, accrochait de temps en temps les branches des arbres qui étaient sur le chemin.

— Ne fais plus de bruit, va plus doucement, soldat ! — chuchota-t-il en colère.