Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/207

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Toporov, qui, éclairés eux-mêmes, emploient leur savoir non comme ils devraient l’employer, non à aider le peuple à sortir des ténèbres de l’ignorance, mais, au contraire, à l’y mieux enfermer. Quand Nekhludov entra dans le salon d’attente de Toporov, celui-ci s’entretenait, dans son cabinet de travail, avec la supérieure d’un couvent, une aristocrate très avisée qui s’était faite l’apôtre de l’orthodoxie dans les provinces occidentales, parmi les uniates ramenés de force à l’orthodoxie.

Un attaché de cabinet de Toporov, qui se tenait dans le salon d’attente, interrogea Nekhludov sur le but de sa visite, et, apprenant que Nekhludov avait l’intention de remettre au souverain une requête en faveur des sectaires, il lui demanda s’il ne voudrait point la lui communiquer. Nekhludov lui remit la requête, et le fonctionnaire entra dans le cabinet. La nonne, en haute coiffe, avec un long voile et une traîne noire, ses mains blanches aux ongles polis tenant un chapelet de topaze, jointes sur sa poitrine, quitta le cabinet et se dirigea vers la sortie. Nekhludov attendait toujours qu’on l’introduisît.

Toporov lisait la supplique et hochait la tête. Il était désagréablement surpris de sa rédaction nette et ferme. « Si elle tombait entre les mains de l’empereur, elle pourrait provoquer des questions oiseuses et des malentendus », songea-t-il quand il en eut achevé la lecture. Il déposa le papier sur