Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/224

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Nekhludov demanda alors au directeur s’il pourrait voir également une détenue politique, Bogodoukhovskaia. Le directeur répondit d’un ton bref que c’était impossible.

— Les entrevues avec les prisonniers politiques sont interdites, déclara-t-il en se replongeant dans la lecture de ses papiers.

Nekhludov, qui avait dans sa poche la lettre destinée à Bogodoukhovskaia, se sentit dans la situation d’un homme pris en faute, dont les plans sont dévoilés et ruinés.

Quand Maslova entra dans le bureau, le directeur releva la tête et, sans regarder ni Maslova ni Nekhludov, prononça : « Vous pouvez. » Et il se plongea de nouveau dans ses papiers.

Maslova portait son ancien costume de prison, jupe et camisole blanches, un fichu sur la tête. L’expression froide et hostile qu’elle remarqua sur le visage de Nekhludov la fit rougir et, saisissant le bord de sa camisole, elle baissa les yeux. Son trouble convainquit Nekhludov que le portier de l’infirmerie avait dit vrai.

Il désirait ardemment l’accueillir de la même façon qu’auparavant, mais il ne put comme il le voulait lui tendre la main, si forte était la répugnance qu’elle lui inspirait.

— Je vous apporte une mauvaise nouvelle, lui dit-il d’une voix calme, sans la regarder ni lui tendre la main. Le Sénat a rejeté le pourvoi.