Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/297

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celle électrique courut des yeux de Telianine à ceux de Rostov et inversement.

— Venez ici, — dit Rostov en prenant Telianine par le bras. Il l’entraîna vers la fenêtre. — C’est l’argent de Denissov, vous l’avez pris, — lui chuchota-t-il à l’oreille.

— Quoi, quoi ! Comment osez-vous ! — prononça Telianine.

Mais ces paroles résonnèrent comme un cri de prière désespérée demandant grâce. Aussitôt que Rostov entendit les sons de cette voix, l’énorme pierre du doute tomba de son âme. Il éprouvait de la joie et en même temps il plaignait le malheureux qui était devant lui ; mais il fallait aller jusqu’au bout.

— Les gens vont penser Dieu sait quoi, — balbutiait Telianine en prenant son chapeau et se dirigeant vers la petite salle vide… Il faut s’expliquer…

— Je sais ce que je dis et je le prouverai — prononça Rostov.

— Moi…

Le visage effrayé, pâle de Telianine, était tout tremblant ; les yeux erraient toujours, sans s’arrêter sur le visage de Rostov ; tout à coup, il entendit un gémissement :

— Comte ! ne perdez pas un jeune homme,… Voici ce maudit argent… prenez-le… — Il le jeta sur la table — J’ai un vieux père… une mère…

Rostov prit l’argent en évitant le regard de