Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/293

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui a dit que le bonheur consistait à chercher la vérité et non à la trouver… »

Levine écoutait sans rien dire, mais il avait beau faire, il ne pouvait entrer dans l’âme de son ami, et comprendre le charme qu’il éprouvait à ce genre d’études.


CHAPITRE XV


L’endroit où Levine conduisit Oblonsky était non loin de là, dans un petit bois de trembles : il le posta dans un coin couvert de mousse et un peu marécageux, quoique débarrassé de neige ; quant à lui, il se plaça du côté opposé, près d’un bouleau double, appuya son fusil à une des branches inférieures, ôta son caftan, se serra une ceinture autour du corps, et fit quelques mouvements de bras pour s’assurer que rien ne le gênerait pour tirer.

La vieille Laska, qui le suivait pas à pas, s’assit avec précaution en face de lui, et dressa les oreilles. Le soleil se couchait derrière le grand bois, et du côté du levant les jeunes bouleaux mêlés aux trembles se dessinaient nettement avec leurs branches tombantes et leurs bourgeons presque épanouis.

Dans le grand bois, là où la neige n’avait pas complètement disparu, on entendait l’eau s’écouler à petit bruit en nombreux ruisselets ; les oiseaux gazouillaient en voltigeant d’un arbre à l’autre. Par moments, le silence semblait complet ; on enten-