par conséquent l’essentiel pour nous est de civiliser nos paysans.
— Comment ?
— En fondant des écoles, des écoles et encore des écoles.
— Mais vous convenez vous-même que le peuple manque de tout développement matériel : en quoi les écoles y obvieront-elles ?
— Vous me rappelez une anecdote sur des conseils donnés à un malade : Vous feriez bien de vous purger. — J’ai essayé, cela m’a fait mal. — Mettez des sangsues. — J’ai essayé, cela m’a fait mal. — Alors priez Dieu. — J’ai essayé, cela m’a fait mal. — Vous repoussez de même tous les remèdes.
— C’est que je ne vois pas du tout le bien que peuvent faire les écoles !
— Elles créeront de nouveaux besoins.
— Tant pis si le peuple n’est pas en état de les satisfaire. Et en quoi sa situation matérielle s’améliorera-t-elle parce qu’il saura l’addition, la soustraction et le catéchisme ? Avant-hier soir je rencontrai une paysanne portant son enfant à la mamelle ; je lui demandai d’où elle venait : « De chez la sage-femme ; l’enfant crie, je le lui ai mené pour le guérir ». Et qu’a fait la sage-femme ? — « Elle a porté le petit aux poules, sur le perchoir, et a marmotté des paroles. »
— Vous voyez bien, dit en souriant Swiagesky, pour croire à de pareilles sottises…
— Non, interrompit Levine contrarié, ce sont