tranquillement et remettant sur ses pattes son abeille délivrée.
— Mais qui donc a déclaré la guerre aux Turcs ? Seraient-ce la comtesse Lydie et Mme Stahl ?
— Personne n’a déclaré la guerre, mais, touchés des souffrances de nos frères, nous cherchons à leur venir en aide.
— Ce n’est pas là ce qui étonne le prince, dit Levine en prenant le parti de son beau-père, mais il trouve étrange que, sans y être autorisés par le gouvernement, des particuliers osent prendre part à une guerre.
— Pourquoi des particuliers n’auraient ils pas ce droit ? Expliquez-nous votre théorie, demanda Katavasof.
— Ma théorie, la voici : faire la guerre est si terrible qu’aucun homme, sans parler ici de chrétiens, n’a le droit d’assumer la responsabilité de la déclarer ; cette tache incombe aux gouvernements ; les citoyens doivent même renoncer à toute volonté personnelle lorsqu’une déclaration de guerre devient inévitable. Le bon sens suffit en dehors de toute science politique, pour indiquer que c’est là exclusivement une question d’État. »
Serge Ivanitch et Katavasof avaient des réponses toutes prêtes.
« C’est ce qui vous trompe, dit d’abord ce dernier : lorsqu’un gouvernement ne comprend pas la volonté des citoyens, la société impose la sienne.
— Tu n’expliques pas suffisamment le cas, interrompit Serge Ivanitch en fronçant le sourcil.