Page:Tolstoï - Dernières Paroles.djvu/329

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une part de lutte, d’excitation, de risque de la vie libre, qui attire toujours la jeunesse. C’est pénible de voir l’énergie d’hommes forts et capables se dépenser à tuer des animaux, à parcourir à bicyclette de grandes distances, à sauter des obstacles, à lutter, etc., et c’est encore plus triste de voir cette énergie se dépenser pour troubler les hommes, pour les entraîner à une activité dangereuse qui détruit leur vie, ou, ce qui est pire encore, à fabriquer de la dynamite, à faire des explosions, ou, tout simplement, à tuer un personnage politique quelconque jugé nuisible, et que des milliers de gens encore plus nuisibles sont prêts à remplacer.

Et le plus triste c’est de voir les personnes les meilleures, les plus morales, bonnes, courageuses, comme l’était Mlle Perovskaia[1], Osinsky, Lisogoub[2] et plusieurs autres — pour ne parler que des morts, — de voir que ces personnes entraînées par la lutte sont amenées non seulement à dépenser leurs meilleures forces pour atteindre l’inaccessible, mais à commettre le crime contraire à toute leur nature, le meurtre, ou à y participer.

Les révolutionnaires disent que le but de leur

  1. Qui participa au meurtre d’Alexandre II.
  2. Riche propriétaire qui donna sa fortune, plusieurs millions, pour la propagande révolutionnaire, et fut pendu.