Page:Tolstoï - Guerre et Paix, Hachette, 1901, tome 3.djvu/268

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d’arrondissement pour tous les quartiers de la ville. Vous les reconnaîtrez au ruban blanc noué sur le bras gauche. Quelques églises, de cultes différents, sont ouvertes et on y officie sans empêchement. Vos concitoyens reviennent dans leurs demeures, et l’ordre est donné pour qu’ils y retrouvent le secours et la protection dus au malheur. Ce sont là les moyens employés jusqu’ici par le gouvernement afin de rétablir l’ordre et d’alléger votre situation, mais pour y réussir il faut que vous unissiez vos efforts aux siens, que vous oubliiez, si possible, vos souffrances passées, que vous caressiez l’espoir d’un sort moins cruel, que vous soyez assurés qu’une mort inévitable et honteuse attend tous ceux qui s’attaqueront à vos personnes et à vos biens, et que ces biens vous seront conservés, car telle est la volonté du plus grand et du plus juste des monarques. Soldats et habitants, de quelque nation que vous soyez, rétablissez la confiance publique, source du bonheur des États, vivez en frères, aidez-vous et protégez-vous les uns les autres ; unissez-vous pour anéantir les desseins des malintentionnés, obéissez aux autorités militaires et civiles, et alors vos larmes cesseront bientôt de couler ! »

En ce qui concerne les subsistances, Napoléon ordonne aux troupes de venir à tour de rôle à Moscou faire la maraude afin de s’approvisionner et de s’assurer des vivres pour un certain temps. Préoccupé de la question religieuse, Napoléon ordonne de ramener les popes et de recommencer dans les églises les cérémonies du culte. La proclamation suivante, ayant trait aux affaires commerciales et à la fourniture des vivres, est également placardée sur tous les murs :

« Habitants paisibles de Moscou, artisans et ouvriers que les désastres ont éloignés de la ville, et vous, agriculteurs dispersés, qu’une terreur non fondée retient dans les campagnes, écoutez ! Le calme est rendu à la capitale, et l’ordre s’y rétablit. Vos compatriotes sortent sans crainte de leurs refuges, assurés d’être respectés. Tout acte de violence touchant leurs personnes et leurs propriétés est immédiatement puni. Sa Majesté l’Empereur et Roi vous protège et ne considère comme ennemis que ceux qui contreviennent à ses ordres. Elle désire mettre un terme à vos malheurs, vous rendre à vos foyers et à vos familles. Répondez donc à ces mesures bienfaisantes en venant à nous sans crainte de danger. Habitants ! retournez avec confiance dans vos demeures : vous trouverez bientôt le moyen de satisfaire à tous vos besoins. Artisans et tra-