Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/171

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— Sais-tu écrire ?

— Je me préparais à être mullah.

— Alors, écris à ton père que s’il retourne chez moi, tout de suite, avant Baïram, je lui pardonnerai, et tout sera comme auparavant. Mais sinon, s’il reste chez les Russes, alors, — Schamyl fronça sévèrement les sourcils, — ta grand’mère, ta mère, tous seront envoyés en différents aouls, et à toi, je te ferai couper la tête.

Pas un seul muscle du visage de Ioussouf ne tressaillit. Il inclina la tête, en signe qu’il avait compris les paroles de Schamyl.

— Écris cela, et remets la lettre à mon envoyé. Schamyl se tut et longuement regarda Ioussouf.

— Écris que j’ai eu pitié de toi, que je ne te tuerai pas, mais que je te ferai crever les yeux, comme je le fais à tous les traîtres. Va.

Ioussouf semblait calme en présence de Schamyl, mais quand on l’eut fait sortir de la chambre, il se jeta sur celui qui le conduisait, et, lui arrachant son poignard, tenta de se tuer ; mais on parvint à lui saisir les mains, et les lui ayant attachées, on le ramena dans la prison.

Ce soir-là, une fois la prière dite, quand la nuit fut venue, Schamyl, prenant sur lui une pelisse blanche, alla de l’autre côté de la barrière dans cette partie de la cour où se trouvaient ses femmes, et il se dirigea vers la chambre d’Aminete. Mais Aminete ne s’y trouvait point. Elle était chez d’autres femmes. Alors Schamyl, tâchant de n’être pas remarqué, se dissimula derrière la porte de la