Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/176

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remercia et s’assit sur une chaise près de la fenêtre.

Le silence qui s’était fait à son entrée ne paraissait point le troubler. Il examina attentivement tous les visages et arrêta un regard indifférent sur la table avec le samovar et les victuailles. Un officier très gai, Petrovski, qui voyait Hadji Mourad pour la première fois, lui demanda, par l’intermédiaire de l’interprète, si Tiflis lui avait plu.

— Ala ! dit-il.

— Il dit que oui, traduisit l’interprète.

— Qu’est-ce qui lui a plu ?

Hadji Mourad répondit quelque chose. Ce qui lui avait plu surtout, c’était le théâtre.

— Eh bien, et le bal chez le général commandant en chef, est-ce que cela lui a plu ?

Hadji Mourad fronça les sourcils.

— Chaque peuple a ses coutumes. Chez nous les femmes ne s’habillent pas ainsi, dit-il en regardant Marie Dmitriévna.

— Qu’est-ce qui lui a déplu ?

— Nous avons un proverbe, dit-il à l’interprète : Le chien nourrissait l’Iman avec de la viande, et l’Iman nourrissait le chien avec du foin. Tous les deux avaient faim. — Il sourit. — À chaque peuple sa vie est bonne.

Ensuite la conversation tomba. Les officiers se mirent à boire du thé et à manger. Hadji Mourad prit un verre de thé qu’on lui offrit et le posa devant lui.