Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/321

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le comprendre, non parce que je suis sa fiancée, mais il a tant de noblesse et, principalement, il est si droit, si pur. C’est écrit sur son visage. On voit qu’il ne cache rien, qu’il n’a rien à cacher. Il ne cache que les traits sublimes de son caractère. De la guerre de Sébastopol, il ne veut pas parler. Il n’aime pas à parler de cela ni de Michel. Quand je l’ai questionné il a rougi. Je te remercie, mon Dieu, je ne désire rien de plus !

Lotoukhine partit pour Moscou, où il devait s’occuper des préparatifs de son mariage. Il s’arrêta à l’hôtel Chevalier. Sur l’escalier il rencontra son camarade Soustchoff.

— Ah ! Gricha ! Est-ce vrai que tu te maries ?

— Oui, c’est vrai.

— Eh bien, je te félicite. Je les connais. Une famille charmante. Je connais aussi ta fiancée ; une vraie beauté. Alors nous dînons ensemble !

Ils dînèrent et burent une bouteille après l’autre.

— Eh bien, allons nous promener un peu.

Ils allèrent à l’Ermitage qui venait d’ouvrir. Comme ils arrivaient au théâtre, ils rencontrèrent Annette. Celle-ci ne savait pas qu’il se mariait ; du reste, l’eût-elle su, que sa conduite eût été la même, elle aurait souri encore plus joyeusement en creusant ses fossettes.

— Ah ! que tu es assommant, allons ! Et elle le prit sous le bras.

— Prends garde, lui souffla derrière lui Soustchoff.