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IV

Après les trois nuits sans sommeil qu’il avait passées à fuir les murides que Schamyl avait lancés contre lui, Hadji Mourad s’endormit aussitôt que Sado eut quitté la cabane, après lui avoir souhaité une bonne nuit. Il dormait tout habillé, appuyé sur son bras, le coude enfoncé dans le moelleux coussin rouge que le maître du logis lui avait apporté. Non loin de lui, près du mur, dormait Eldar. Eldar était couché sur le dos, ses jeunes membres vigoureux largement écartés, de sorte que sa poitrine bombée, recouverte de sa tcherkeska blanche à rayures noires, était plus haute que sa tête fraîchement rasée, bleuissante, qui retombait de l’oreiller. Sa lèvre supérieure, courte comme chez les enfants, et surmontée d’un léger duvet, s’abaissait et se relevait de sorte qu’il paraissait boire. Comme Hadji Mourad, il dormait tout habillé, le pistolet et le poignard à la ceinture. Dans l’âtre, des branches achevaient de brûler et la veilleuse projetait seulement une faible lueur.

Au milieu de la nuit, la porte de la cabane réservée aux hôtes grinça, et Hadji Mourad se dressa aussitôt et saisit son pistolet. C’était Sado