Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/41

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Hadji Mourad saisit rapidement son fusil, mit le pied dans l’étrier de gauche, et, sans bruit, enjamba en un clin d’œil le haut coussin de sa selle.

— Dieu vous récompense ! dit-il au maître du logis, tout en cherchant d’un mouvement habituel du pied droit l’autre étrier ; puis il toucha de sa cravache le garçon qui tenait le cheval, lui indiquant par cela de s’écarter. Le garçon se recula, et le cheval, comme s’il savait lui-même ce qu’il avait à faire, rapidement sortit de la ruelle sur la rue principale. Eldar marchait derrière. Sado en pelisse les suivait en courant d’un côté à l’autre de la rue étroite, en agitant rapidement les bras. Tout à coup parut sur la route une ombre qui se mouvait, puis une autre.

— Arrête ! Qui va là ? Arrête ! cria une voix, et quelques hommes barrèrent la route. Au lieu de s’arrêter, Hadji Mourad tira son pistolet de sa ceinture, accéléra sa course et dirigea son cheval droit sur les hommes qui lui barraient le chemin. Les hommes s’écartèrent et, sans se retourner, Hadji Mourad, au grand galop, descendit la route. Eldar le suivait à la même allure. Deux coups de fusil retentirent derrière eux, deux balles sifflèrent, mais sans atteindre ni lui ni Eldar. Hadji Mourad allait toujours au grand galop, mais, au bout de trois cents pas, il arrêta son cheval un peu essoufflé et se mit à écouter. Devant lui, en bas, c’était le bruit du torrent. Derrière, dans l’aoul, les coqs s’interpellaient, et à travers ces bruits s’entendait le piétinement de chevaux qui s’approchaient