Page:Tolstoï - L’Église et l’État, 1905.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
Léon Tolstoi

Pourquoi ? La raison la plus simple serait que la galette et les œufs sont nécessaires aux prêtres, et qu’il faut aux archevêques, les palais, les gâteaux et les soutanes de soie. Mais cette réponse ne suffit pas. C’est sans doute la raison intérieure, psychologique de la tromperie, le prétexte qui soutient la tromperie, mais, en raisonnant ainsi, comment pourrait-on comprendre qu’un homme (le bourreau) puisse se décider à en tuer un autre contre qui il n’a aucune colère ? Ce serait insuffisant de dire que le bourreau tue, parce qu’on lui donne de l’eau-de-vie, du pain blanc et une chemise rouge ; de même il est insuffisant de dire que le Métropolite de Kiev, et les moines, remplissent des sacs de paille et les appellent des reliques des saints seulement pour avoir 30.000 roubles de revenus. L’une et l’autre action sont trop horribles et trop contraires à la nature humaine pour qu’une explication aussi simple et grossière puisse suffire. De même que le bourreau, le Métropolite, pour expliquer son acte, donnera une série de preuves basées principalement sur la tradition historique : « Il faut tuer l’homme ; on a supplicié depuis que le monde existe ; si ce n’est moi ce sera un autre ; j’espère, avec l’aide de Dieu, le faire mieux qu’un autre ! »

20