Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/188

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doctrine, vu toute son existence, ainsi que celle de ses disciples. Mais est-ce bien vrai ?

En approfondissant abstraitement la question de savoir laquelle des deux situations sera la meilleure : celle des disciples de Jésus ou celle des disciples du monde, on ne peut pas ne pas voir que la situation des disciples de Jésus doit être meilleure, uniquement parce que les disciples de Jésus, en faisant le bien à tout le monde, n’éveilleront pas la haine des hommes. Les disciples de Jésus, ne faisant de mal à personne, ne peuvent être persécutés que par les méchants ; les disciples du monde, au contraire, doivent être persécutés par tous, vu que la loi des disciples du monde est la loi de la lutte, c’est-à-dire de la persécution mutuelle. Quant aux souffrances accidentelles, elles sont les mêmes pour les uns comme pour les autres, avec cette différence que les disciples de Jésus y seront préparés, et que les disciples du monde emploieront toutes les forces de leur âme à les éviter, et encore, que les disciples de Jésus, en souffrant, sentiront que leurs souffrances sont utiles au monde et que les disciples du monde ne sauront pas pourquoi ils souffrent. En raisonnant abstraitement, la situation des disciples de Jésus doit être plus avantageuse que la situation des disciples du monde. Mais en est-il ainsi en réalité ?

Pour vérifier cela, que chacun se souvienne de tous les moments pénibles de sa vie, de toutes les souffrances physiques et morales qu’il a endurées et qu’il endure, et qu’il se demande au nom de quoi il a enduré toutes ces calamités. Est-ce au nom de la doctrine du monde ou de celle de Jésus ? Que tout homme sincère se souvienne bien de toute sa vie et il s’apercevra que jamais, pas