Page:Tolstoï - Quelle est ma vie ?.djvu/46

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avec des colonnes et des tables près des fenêtres et le long des murs. Quelques hommes étaient à table et prenaient du thé, les uns déguenillés, les autres mis convenablement, comme des ouvriers ou de petits boutiquiers ; quelques femmes se trouvaient avec eux. La cantine était très sale, mais on voyait de suite qu’elle faisait de bonnes affaires à l’air affairé de l’homme qui se tenait derrière le comptoir et à l’empressement des garçons. À peine venais-je d’entrer qu’un de ceux-ci se disposa à me débarrasser de mon paletot et à servir ce que je demanderais. Là, évidemment, les gens avaient pris l’habitude d’un travail actif et régulier. Je demandai où étaient les recenseurs. « Vania ! » cria un petit homme vêtu à l’allemande, qui rangeait quelque chose dans l’armoire de l’autre côté du comptoir. — C’était le patron de la cantine, un moujik de Kalouga, Ivan Fedorovitch, qui louait la moitié des logements des maisons Zimine et les sous-louait à des locataires. Un garçon, âgé d’environ 18 ans, au nez aquilin, au teint jaune, accourut. — « Conduis ce monsieur chez les recenseurs ; ils sont allés au grand corps de logis au-dessus du puits ». Le garçon jeta sa serviette, passa un