Page:Tolstoï Les Cosaques.djvu/29

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— Holà ! diadia ! » cria d’en haut Loukachka d’une voix perçante pour attirer l’attention des causeurs.

Les Cosaques se tournèrent vers lui. « Remonte le torrent, tu y trouveras tout un troupeau : je te jure que je ne mens pas ! un des nôtres a tué un sanglier l’autre jour, je te le jure ! ajouta-t-il d’un ton sérieux et convaincant.

— Ha ! Loukachka, l’ourvane est ici ! s’écria le vieux chasseur, levant les yeux vers l’échauguette ; où le sanglier a-t-il été tué ?

— Suis-je si mignon que tu ne m’aies pas aperçu ? dit Lucas. Le sanglier était près du fossé ; mon fusil était dans une housse, c’est Hiouchka qui l’a tué. Je te montrerai l’endroit, vieux, c’est près d’ici ; je connais toutes les menées de la bête. Diadia Mosséi ! s’adressa-t-il d’un ton d’autorité à l’ouriadnik, il est temps de relever la sentinelle. » Et, sans attendre l’ordre du chef, il prit son fusil et descendit.

« Descends » dit l’ouriadnik, jetant les yeux autour de lui ; est-ce ton tour, Gourko ?… va ! C’est un fin matois, ton Loukachka ! ajouta-t-il en s’adressant au vieux chasseur ; comme toi, il ne reste jamais en place ; il a tué une bête ces jours-ci. »


VII


Le soleil était couché, et les ombres de la nuit descendaient rapidement sur la forêt. Les Cosaques avaient terminé leur service au cordon et se réunissaient pour souper dans l’izba. Le vieux chasseur restait seul sous la tchinara, attendant l’oiseau de proie et tiraillant la ficelle attachée à la patte de l’épervier. Loukachka préparait lentement des lacs pour les faisans et chantait une chanson après l’autre. Malgré sa haute taille et ses grandes mains tout menu ouvrage lui était familier.