Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce moment-là par quelque ressouvenir de spirale ascensionnelle, le voilà qui est pris d’un fou rire à se rouler par terre, et crac, le fagot cède, le pied trempe dans les bouillons, la chair s’étend sur les épines : on dirait Guatimozin sur le gril. Guatimozin est retiré du fagot, mais non pas de la spirale, et jusque par delà Useigne il en est à se tenir les côtés d’une gaieté qui ne veut ni rentrer ni sortir. Telle est l’espèce particulière de mélancolie où se berce Martin Marc, à l’heure justement où la pluie tache de ses premières gouttes les pierres du sentier.

Nos guides sont à l’arrière, où sans doute ils s’informent du chemin qu’il faut prendre ; en sorte que, sans les directions d’un jeune garçon dont nous avons fait la connaissance pendant notre halte aux pyramides, nous risquerions fort de manquer le pont sur lequel on passe la Borgne à Pragan, et d’aller nous égarer dans quelque solitude inhabitée, et, par le temps qu’il fait, inhabitable. Ce jeune garçon, âgé d’environ seize ans, est beau de figure comme il est intéressant par ses idées naïves, par son langage sensé, et par des manières en même temps affectueuses et discrètes. Pourtant il nous questionne ; mais aussi inexpérimenté dans ses demandes qu’il est intelligent de nos réponses, à chaque instant se trahit sur son visage l’éveil de la pensée et la pudeur de l’étonnement. Nous apprenons de lui que, neveu du curé d’Héremence, il va, durant les beaux jours, séjourner à la cure, où son oncle lui enseigne le latin. « Et qu’en ferez-vous, de ce latin ? lui demandons-nous. — Qui peut savoir, monsieur ? répond-il. Le plus pressé, c’est d’apprendre ; si ensuite on ne s’élève pas