Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/353

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face de Brigg on passe le Rhône, puis, en tournant à droite, l’on traverse le joli village de Naters caché sous de grands arbres, et tout à l’heure on commence à s’élever de plateaux en plateaux dans la jolie vallée de Conches. Grandes routes, grelots, fracas, sont maintenant bien loin derrière, et l’on suit jusqu’au soir lui de ces petits chemins assez bons pour que les chariots du pays puissent y serpenter lentement, assez mauvais pour que pas une calèche n’ose s’y aventurer. Aussi plus de poussière, et du calme sans solitude. Toutefois, la chaleur, ce matin, est étouffante ; en sorte que, faute d’ombrages qui soient à notre portée, nous hantons les chapelles. Ce genre de halte a bien son prix. L’on trouve là, en effet, une fraîcheur délicieuse, des bancs où s’asseoir, des saints à qui parler, et sur la muraille des Alisi Penay par centaines tracés tant à la sanguine qu’au charbon, ou à la craie encore, si c’est sur le fond noirâtre d’une fresque effacée. Quelques Alisi de notre société s’inscrivent à la suite de tous ces Penay.

À Lax, l’hôtesse est toute ronde, le déjeuner tout court, l’endroit charmant pour qui sait se plaire à ce qui entre, regarder à ce qui sort, s’intéresser à ce qui survient. Ce qui survient ici, ce sont deux grands troupeaux de taureaux qui envahissent la rue, qui encombrent le seuil, qui assiègent la fontaine. Farouches et haletants, ces animaux mugissent, se heurtent, se poussent ou s’entraînent, et l’histoire de voir tout cela de pas trop près n’ôte certainement rien à l’agrément du spectacle. Ce qui