Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/383

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nos yeux ce phénomène inouï d’une dizaine de Français, non pas barbus, touffus, hagards, olympiens (toutes ces espèces-là, même parisiennes, sont muettes), mais Français véritables, comme il faut, chez lesquels rien ne trahit ni prétention, ni hauteur, ni défaut de bienveillance ouverte et d’affabilité courtoise, et qui néanmoins, salués au coin d’un bois par une troupe joyeuse d’écoliers en tournée, passent outre sans saluer, sans accueillir, sans sourire !… L’hypothèse de M. Töpffer, c’est qu’ils ont les yeux derrière la tête, ou encore que ce sont des Français qui ont été changés en nourrice.

Au delà de Guttanen nous sommes rattrapés par les mariés d’Alsace qui fuient une kyrielle allemande de fumeurs de l’université qu’on aperçoit à l’arrière. Le monsieur, plus rouge du tout, est bien mieux qu’hier ; la descente lui va, et la pluie aussi. En revanche, sa jeune épouse, qui ne s’est tirée des étudiants à pipe que pour venir tomber parmi d’autres étudiants sans pipe, est bien moins pâle qu’hier, et à chaque anneau de notre longue chaîne qui se tire de côté pour qu’elle puisse plus vite devancer,