Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/282

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frappé, que, ma conviction me quittant tout à coup, je retins mon haleine, prêt à m’enfuir si j’entendais le moindre bruit ; mais rien ne se fit entendre. Alors je frappai moins doucement, ensuite plus fort ; et, après avoir acquis ainsi la certitude que l’appartement était inhabité dans ce moment, je me hasardai à sonner… Aussitôt une porte s’ouvrit à l’étage au-dessous, et une lumière éclaira d’une faible lueur la place où j’étais.

La personne ne bougeait ni ne parlait, et la lueur restait la même. Que devais-je faire ? Fuir dans les étages supérieurs ? C’était me faire poursuivre, et attirer sur moi la honte et le soupçon. Rester en place ? Déjà une sueur froide m’en ôtait le pouvoir, et chaque seconde qui s’écoulait dans cette situation me paraissait un siècle d’angoisses. Descendre hardiment ! Je n’en avais pas le courage. Je me décidai à sonner encore. « C’est lui ! » s’écria une voix, et aussitôt j’eus devant les yeux la voisine qui m’avait insulté la veille.

Le visage de cette femme respirait la fureur : Indigne, me dit-elle, et vous osez revenir !!… Quelle impudence !… Votre manteau, n’est-ce pas ?… Il est chez monsieur le pasteur du quartier. Allez l’y chercher. Il sait tout, et vous trouverez là à qui parler.

J’écoutais ces paroles violentes et entrecoupées avec plus d’étonnement que de colère : — Madame, lui dis-je, j’ignore qui vous êtes ; ce que je comprends mieux, c’est l’imprudence avec laquelle vous compromettez cette honnête enfant, en me calomniant moi-même.

— Monstre ! interrompit-elle, je ne t’ai pas vu !… je n’ai pas vu ses pleurs !… ; ce n’est pas moi qui ai recueilli votre manteau, resté auprès du lit !!…

— Je ne vous entends pas, interrompis-je à mon tour : au surplus, je ne viens ni pour vous écouter, ni pour