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armé d’un brin de paille pour diriger les travaux et barrer les passages, je le force à se promener de telle façon qu’il écrive lui-même mon nom ! Il fallut deux heures ; mais quel chef-d’œuvre !

La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite, dit Buffon, c’est… c’est bien certainement le hanneton !




Pour diriger cette opération, je m’étais approché du jour. Nous achevions la dernière lettre, lorsqu’une voix appela doucement : — Mon ami ! Je regardai aussitôt dans la rue. Il n’y avait personne. — Ici ! dit la même voix : — Où ? répondis-je. — À la prison.

Je compris que ces paroles, sorties du soupirail, m’étaient adressées par le scélérat dont l’affreux sourire m’avait tant bouleversé. Je reculai jusque dans le fond de ma chambre.

— N’aie pas peur, continua la voix, c’est un brave homme qui te parle… — Coquin ! lui criai-je, si vous continuez à me parler, je vais avertir le factionnaire là-bas !

Il se tut un moment. — En passant l’autre jour dans la rue, reprit-il, je vis votre figure, et je vous attribuai un cœur capable de plaindre une victime infortunée de l’injustice des hommes… — Taisez-vous ! lui criai-je encore, scélérat, qui avez tué un vieillard, un enfant !… — Mais vous êtes, je le vois, aveuglé comme les autres. Bien jeune, pourtant, pour déjà croire au mal ! Il se tut à l’ouïe d’une personne qui passait dans la rue. C’était un monsieur vêtu de noir. J’ai su, depuis, que c’était un employé aux pompes funèbres.

Lorsque cet homme se fut éloigné : — Voilà, dit-il, le respectable aumônier de la prison. Celui-là sait,