Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/253

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bonne heure ; mais du moins il va faire quelque chose d’utile, tandis que nous… »

— Je crois apercevoir monsieur, dit tout à coup Pierre à basse voix.

Bazarof leva la tête et distingua Paul, qui s’avançait rapidement sur la route, vêtu d’une veste de couleur et d’un pantalon blanc comme neige ; il tenait sous le bras une boîte dans un étui vert.

— Excusez-moi, je crains de vous avoir fait attendre, dit-il en saluant d’abord Bazarof et ensuite Pierre, qu’il considérait en ce moment comme une sorte de second ; je n’ai pas voulu éveiller mon valet de chambre.

— Ce n’est rien, répondit Bazarof, nous ne faisons que d’arriver.

— Ah ! tant mieux ! Paul jeta les yeux autour de lui. — Personne ne nous voit ; nous ne serons pas dérangés. Commençons-nous ?

— Volontiers.

— Je suppose que vous ne souhaitez point d’autres explications ?

— Pas le moins du monde.

— Voulez-vous prendre la peine de les charger ? dit Paul en tirant les pistolets de la boîte.

— Non ; chargez vous-même. Je vais mesurer la distance. J’ai les jambes plus longues, ajouta Bazarof avec un sourire malicieux. Un, deux, trois…

— Eugène Vassilievitch, dit Pierre avec effort, (il tremblait comme dans un accès de fièvre), faites comme vous voudrez, mais je vais me retirer un peu.