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éclata. Le journal qu’Edmond de Goncourt a laissé de ses impressions durant l’année terrible et qui a soulevé, on s’en souvient, de retentissantes polémiques, est entre toutes les mains. On sait donc par lui-même qu’il s’obstina jusque dans les premiers jour de janvier 1871 à ne pas quitter Auteuil, mais le bombardement rendit à la fin la position intenable et il accepta l’hospitalité chez Burty qui, chassé lui-même de la rue Watteau par les obus, s’était réfugié rue Vivienne 55, dans la maison d’angle où la Gazette des Beaux-Arts avait alors ses bureaux. L’appartement vide où Burty avait empilé en hâte ses meubles et ses collections était un vaste premier étage, destiné plutôt au commerce qu’à l’habitation bourgeoise et situé au-dessus de la librairie internationale Lacroix et Cie. C’est là qu’Edmond vint à son tour entreposer ses livres et ses portefeuilles encore ficelés pour la plupart depuis l’emménagement de la rue Saint-Georges. Il s’en fallut de peu d’ailleurs qu’après avoir évité les projectiles des batteries prussiennes, ses collections et celles de Burty ne fussent incendiées par les canonnades des derniers jours de mai, car du haut du balcon de la rue Vivienne, les deux amis purent voir les suprêmes convulsions de la résistance expirante.

Les portes rouvertes et les rues déblayées, Burty transporta ses pénates au boulevard des Batignolles et Edmond de Goncourt, après s’être allégé dans une vente anonyme, dirigée par Voisin, de quelques livres sans grande valeur ou étrangers à ses études, réintégra la maison du boulevard Montmorency, cruellement éprouvée par les bombardements qu’elle avait essuyés, car il fallut avant tout panser les plaies béantes aux murs et au toit.

Au sortir d’une longue phase d’abattement (1871-1872), ce fut pour lui un cruel plaisir de mettre au jour les livres et les travaux au bas desquels pouvait encore figurer une double signature. Il réimprima, sans y rien