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tion dont un héritage est chargé. Hypotheca. Il m’a constitué une rente avec une affectation spéciale sur cette terre. Ce revenu a une affectation particulière, il doit être employé à telles & telles aumônes par sa fondation, & sa destination.

Affectation. En termes de Palais, action d’affecter, d’attribuer une chose à une autre. Attribution. Attributio, destinatio. Le serment particulier que font les Chantres ou Vicaires-Choristes, l’obéissance qu’ils jurent au Chantre en ce qui concerne l’office divin, l’affectation de leur bénéfice au chœur, la résidence continuelle qu’ils doivent pour y desservir, & les autres engagemens, qui caractérisent ces sortes de bénéfices, ne permettent pas de les confondre avec les bénéfices qu’on nomme libres. Que le sieur B. ne sorte donc point de sa sphère par l’affectation au chœur.

On dit aussi en Jurisprudence Canonique, Affectation d’un Bénéfice, en parlant de sa réservation au Pape, aux Gradués, &c. Jus, attributio.

Affectation, en termes de Medecine, se dit de la disposition d’un membre à l’égard des maladies, ou des blessures qui l’incommodent. Affectio. Quand on ordonne un remède, il faut avoir égard à l’affectation des parties.

AFFECTER, verb. act. Aimer, souhaiter quelque chose avec empressement & avec ostentation, la rechercher avec trop de soin. Affectare, consectari. Jesus-Christ a blâmé les Pharisiens d’affecter les premiers rangs dans les Assemblées. Les Républiques appréhendent ceux qui affectent la tyrannie. Il affecte des manières de parler & d’agir qui sont singulières. J’espère que les rieurs dont il affecte les suffrages, ne seront pas de son côté. Menage. On n’est jamais si ridicule par les qualités que l’on a, que par celles que l’on affecte d’avoir. Rochef.

Affecter, signifie encore plus spécialement, faire les choses avec dessein, & avec artifice, prendre quelque chose à tâche. Dans toutes les professions chacun affecte une mine extérieure, pour paroître ce qu’il veut qu’on le croie. Nicol. C’est à la Cour que l’amitié affecte de s’étaler, & de jouer ses rôles les plus artificieux. M. Esp. Il affecte de dire en secret des choses de rien.

Affecter, signifie encore, Feindre, contrefaire. Fingere, simulare. Il y a un certain âge où il faut affecter d’être sage, de peur de passer pour ridicule. Flech. J’affectois à tes yeux une fausse fierté. Racin. Bien loin de soulager les personnes affligées, vous affectez de les ignorer Flech. Sous l’humble dehors d’un respect affecté, vous cachez une noire malignité. Boil.

Affecter, signifie encore, Toucher, émouvoir, intéresser. Molière connoissoit le point de vue du théâtre, qui demande de grands traits pour affecter le public. Vie de Mol. ☞ Il y a des pièces très-régulières qui n’affectent point les spectateurs. Je n’ai pas de peine à deviner comment vous aurez été affecté de l’Iliade de M. de la Motte, & de sa Dissertation critique. L’Abbé de Pons. Bien loin de juger d’une pièce que nous entendons pour la première fois, nous nous défions de ses beautés tant qu’elle n’est que dans la bouche des Acteurs : quelque bien affectés que nous en soyons, nous suspendons notre jugement jusqu’à ce que nous l’ayons lue, & véritablement elle ne nous fait pas toujours sur le papier le même plaisir qu’elle nous a fait sur la scène. Le Sage. Il est aussi réciproque. C’est un homme qui s’affecte aisément.

Affecter. En termes de Physique c’est, dit M. Perrault, revêtir, couvrir un corps de quelque qualité ou affection ; c’est donner à un corps quelque qualité, quelque propriété. Les différentes couleurs affectent différemment un corps. Le froid & le chaud affectent différemment les corps. Des graines de même espèce semées dans la même terre produisent des herbes & des plantes toutes semblables, parce que la même terre & les sels qu’elle contient, les affectent de la même manière ; au contraire elles dégénèrent, ou ont plus de force dans un autre climat, parce que les sels de la terre & les affections de l’air étant différens, ils affectent différemment ces graines & ces plantes. Les qualités qui surviennent à un corps, & dont il est affecté. Perrault.

Affecter, signifie aussi, attacher, joindre. Adnectere, adjungere, attribuere On a affecté ce droit à la charge.

Affecter, en Jurisprudence, signifie obliger, hypothéquer au paye-


ment de quelque rente, ou de quelques charges ou devoirs. Oppignerare fundum. Tous ses biens sont affectés & hypothéqués à ses créanciers. Les revenus de ce bénéfice sont affectés avant toutes choses au payement des pensions. Les revenus de cet Hôpital sont affectés à la nourriture des orphelins.

Affecté, ée. part. Qui a de l’affectation, qui paroît recherché & étudié avec trop de soin, & trop d’art. Affectatus, exquisitior. Il a un air affecté qui le rend ridicule. Cléante ne rend pas justice au P. Bouhours, quand il dit que le Livre de ce Pere est d’un style affecté, flatté, peint, de nul usage, un pur artifice. L’air affecté & précieux empoisonne les meilleures choses. M. Scud. Ce qui est faux & affecté, est toujours fade & ennuyeux. Id. La simplicité affectée est une imposture délicate. Rochef. Je ne saurois souffrir vos rigueurs affectées. Gomb. L’ignorance vaut mieux qu’un savoir affecté. Boil.

On appelle en termes de Jurisprudence canonique, un bénéfice affecté, quand il est chargé de quelque mandat, indult, nomination ou réservation du Pape, en telle sorte que le collateur n’y peut pourvoir à la première vacance qui arrive : ce qui n’a point lieu en France. Attributus, addictus. On dit aussi, qu’il y a des noms affectés à certaines familles ; pour dire, qui leur sont attachés. Addictus, destinatus, proprius. Le nom de Taxile étoit affecté à ceux qui succédoient au Royaume. Vaug. Il y a des droits & des priviléges affectés à certaines charges ; pour dire, qui leur sont attribués.

En termes de Médecine on dit, qu’une partie du corps est affectée de quelque maladie, quand elle a contracté une mauvaise qualité ou disposition par quelques humeurs malignes, ou par quelque autre cause. Malè affectus. Ce Prédicateur a la poitrine affectée ; il ne soutiendra pas long-temps ce ton-là.

AFFECTIF, ive. adj. Qui affecte, qui touche, qui excite, qui remue les passions. Affectuum movendorum potens, peritus. On le dit particulièrement en matière de pieté & de dévotion. Il a un naturel tendre & affectif. Son discours est affectif & touchant. Ses manières de prononcer sont affectives. ☞ On dit en termes de Théologie, amour affectif, qui est accompagné d’affection, de tendresse sensible. Il est opposé à l’amour effectif, qui est celui qui indépendamment de l’affection et de la tendresse, & même sans cette affection sensible, agit, travaille pour la gloire de Dieu, obéir à ses commandemens, évite de l’offenser & de lui déplaire. Dévotion affective, ou dévotion sensible : c’est un goût, une tendresse sensible de dévotion. Oraison affective, est celle qui produit les actes de la volonté. En effet, en termes de spiritualité affectif étant opposé à effectif, signifie ce qui consiste en sentimens intérieurs, en affections du cœur. L’oraison affective est plus parfaite que l’oraison discursive. Il y a, disent les Théologiens, deux sortes de vertus : les unes, selon le langage de l’école, vertus affectives, & les autres, vertus effectives. C’est à-dire, qu’il y a des vertus qui sont toutes renfermées dans le Cœur, & qui ne consistent qu’en de simples complaisances, dans le désir, l’affection, le sentiment, & qu’il y a des vertus qui se produisent au-dehors par des effets, & dont le mérite est d’exécuter, d’accomplir, de pratiquer. Bourdal. Exh. I. 404.

AFFECTION, s. f. Passion de l’ame qui nous fait vouloir du bien à quelqu’un, & qui se dit de l’amour, de la tendresse, de l’amitié. Amor, studium, benevolentia. Porter l’affection à quelqu’un ; prendre quelqu’un en affection. Ablanc. L’affection des hommes a coutume de changer avec la fortune. Ce père a une ardente affection pour ses enfans. L’affection conjugale est plus forte que la paternelle. Il faut pourtant remarquer sur ce mot, pris dans le sens de bienveillance & d’amitié, qu’il n’y a que les Grands qui s’en puissent servir à l’égard de leurs inférieurs. Ce Prince témoigne une affection toute singuliére aux personnes qui s’attachent à lui, & qui le servent fidèlement. Alexandre prenoit le mérite en affection. Ablanc. Il y a des Auteurs qui prétendent qu’on s’en peut servir d’égal à égal ; mais il faut que ce soit avec ménagement, & lorsque l’on est dans une grande familiarité. Une affection parfaite vaut mieux que toutes choses. Voit. Penser à Dieu autant qu’on le peut, refuser son cœur à tout ce qui n’en est pas digne, & lui en donner tous les sentimens & toutes les affections, c’est une conduite très-simple, qui