Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/18

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cours diuin, & laiſſames l’iſle du coſté que le Pilote ſouhaitoit le plus, flechiſſant noſtre route vers le Moſambic. Ceux qui ſont verſez en ceſte nauigation & qui cognoiſſent les lieux, deſquels nous parlons, verront aſſez combien l’apprehenſion ou des vents ou des rochers nous faiſoit eſloigner de noſtre droict chemin. Voilà pourquoy le voyage de Portugal aux Indes, que nos Coſmographes diſent eſtre de quatre mille lieues en droicte ligne, les Nautonniers le jugent eſtre de cinq mille cinq cens lieuës, en quoy à mon aduis ils ſe trompent de cinq cens lieuës. Et ce d’autant qu’ils eſtiment (ignorans qu’ils ſont des Mathematiques) que les degrez ou pluſtoſt les paralleles ſont partout eſgaux, comme ils le trouuent en leurs cartes marines qui ſont deſcrites & marquées en quarré. Or le monde eſtant rond comme il eſt, il faict ſes paralleles pres de l’Equinoxial fort grands, & à meſure qu’ils s’approchent du Pole touſiours plus petits. Au chemin qui eſt entre l’iſle ſuſdicte & le Moſambic, nous couruſmes deux grãdes fortunes plus dangereuſes que toutes les precedentes. Car deux nuicts durant, la varieté des vents fuſt ſi grande, qu’en vne ſeule nuict le vent ſe changea trente-ſept fois. Les Ma-