Page:Trollope - Le Cousin Henry.djvu/27

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fût prête, et à ce qu’il se trouvât confortablement à Llanfeare. Ne serait-il pas bon de commander pour lui un dîner à part ? Trois heures de l’après-midi, ne serait-ce pas une mauvaise heure pour un homme habitué à la vie de Londres ? « Si elle ne lui convient pas », dit le vieillard avec irritation, « il retournera à Londres. » Cette irritation ne s’adressait pas à la jeune fille, mais à l’homme qui, par le seul fait de sa naissance, soulevait ainsi tout un océan d’ennuis.

« Je vous ai dit mes intentions, dit l’oncle à son neveu le soir de son arrivée.

— Je vous suis assurément très obligé, mon cher oncle.

— Vous n’avez pas à m’être le moins du monde obligé. J’ai fait ce que je considère comme un devoir. Je puis prendre d’autres dispositions, si je trouve que vous ne méritez pas d’être mon héritier. Quant à Isabel, elle mérite tout le bien qu’on pourrait lui faire. Elle ne m’a jamais causé le moindre déplaisir. Je ne crois pas qu’il y ait au monde une meilleure créature qu’elle. Mais comme vous êtes l’héritier mâle, je crois régulier que vous me succédiez dans la propriété, à moins que vous ne vous en montriez indigne. »

C’était là certainement un accueil désagréable, une déclaration à laquelle il était difficile de répondre. Néanmoins le jeune homme était satisfait, si le vieillard ne devait pas changer encore une fois ses intentions. Il avait beaucoup réfléchi sur ce sujet, et avait compris que le meilleur moyen de s’assurer les belles et bonnes choses qui lui étaient promises, était d’amener Isabel à être sa femme.

« Je suis certain qu’elle est bien tout ce que vous dites, oncle Indefer. »

L’oncle Indefer répondit par un grognement, et lui dit qu’il se fît servir, s’il avait besoin de souper.