Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/536

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point, c’est-à-dire de plus des deux tiers du royaume. Demandera-t-on des déclarations aux propriétaires ? Qu’ont-elles produit pour le vingtième ? Mais, dit-on, dans la Théorie de l’impôt, on laissera subsister l’imposition in statu quo pour les pays où il n’y a point de baux, jusqu’à ce que la culture ait fait assez de progrès pour qu’il y en ait. Cela est bon pour la province entière ; mais à l’égard des paroisses, pour la répartition entre les propriétaires de chaque héritage, il faudrait en revenir aux estimations.

Et puis, attendre bien longtemps pour qu’il y ait partout des baux. Je ferai voir plus bas, lorsqu’il s’agira de développer les progrès de la grande culture[1], qu’ils ne seront pas si prompts que l’imagine M. de Mirabeau[2].

La restauration de la culture ne peut commencer que par les propriétaires. La masse des capitaux destinés à faire la base des entreprises rurales a besoin d’un long temps pour se former.

Il faut donc s’en tenir à la répartition d’une somme fixe, sauf à régler le montant de cette somme fixe suivant une certaine proportion avec les revenus de la nation ; chose dont je ferai voir plus bas la possibilité et les moyens.

Cette répartition ne peut se faire arbitrairement sans tomber dans une grande partie des inconvénients qu’on reproche à la taille. Je dis une partie, non pas tous ; car il faut convenir qu’une partie des inconvénients de l’imposition actuelle vient de ce qu’elle ne porte pas sur le propriétaire, mais sur les cultivateurs et sur les misérables habitants de la campagne. Il en resterait cependant beaucoup.

On peut assurer que dans cette répartition annuelle le pauvre propriétaire serait toujours écrasé, et que tous les gros propriétaires dont la voix serait prépondérante[3]

  1. Voyez cette question de la grande culture, traitée dans l’Avis sur la taille de 1766.
  2. L’auteur de la Théorie de l’impôt, de l’Ami des hommes, et d’un grand nombre d’autres écrits économiques. — Mort le 13 juillet 1789.
  3. Cet intéressant Mémoire n’a pas été achevé : on en a dit la cause page 393, note. (E. D.)