Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/580

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généralité, ce serait donc perpétuer l’injustice de la répartition actuelle et en préparer une plus grande par la suite. L’abonnement ne doit être fait que pour la totalité du royaume, et l’abonnement sur le pied actuel pour chaque province ne doit être que provisoire. Ainsi, cet abonnement particulier ne doit être présenté dans l’édit que sous la forme d’un état de répartition entre les provinces de l’abonnement général. Le préambule indique cette vue, les articles VII et VIII y reviennent ; mais il me semble qu’elle doit être annoncée dans l’article Ier[1].

II. L’abonnement porté par l’article précédent aura lieu tant que les impositions des vingtièmes et 2 sous pour livre du dixième auront cours. Faisons défenses expresses de percevoir pour lesdites impositions une somme plus considérable que celle à laquelle le total desdits rôles, déduction faite d’un vingtième sur ceux de l’industrie, se trouvera monter pour chacune desdites généralités, à peine de concussion.

Observations. — Pourquoi défendre une chose qui, par le nouveau plan de répartition, devient impossible ? À qui fait-on ces défenses ? Est-ce au receveur des tailles qui perçoit ? N’est-il pas suffisamment défendu de percevoir au delà du montant des rôles exécutoires ? — Est-ce à ceux qui rendent les rôles exécutoires ? Pourquoi présumer qu’ils puissent être tentés d’une chose aussi extravagante que d’augmenter le montant d’une imposition fixée par le roi ? A-t-on vu des intendants augmenter la taille de leur généralité ? Et le pourraient-ils, quand ils le voudraient ? Les comptes de ces impositions ne passent-ils pas à la Chambre des comptes ? Jusqu’à présent le vingtième était variable, et on l’augmentait suivant la proportion des revenus connus de chaque particulier. Mais c’était une suite du système de cette imposition consacré par une loi. Défendre avec cette solennité une augmentation devenue impossible par le nouveau système qu’on prend, ce serait en quelque sorte autoriser le public à faire un crime aux employés d’avoir exécuté la loi qui leur était prescrite, et donner du poids à des déclamations aussi vagues qu’injustes.

III. Voulons que la somme à laquelle se trouvera porté l’abonnement desdits vingtièmes et 2 sous pour livre du dixième, suivant

  1. Aujourd’hui, les contingents départementaux de la contribution foncière sont fixes, sauf en ce qui concerne les propriétés bâties. La dernière modification qu’aient subie ces contingents date de la loi du 51 juillet 1821, qui opéra un dégrèvement de 19,619,229 francs 80 centimes, applicable à cinquante-deux départements. Quant à la mobilité des contingents relatifs à la propriété bâtie, elle n’est devenue légale qu’en vertu de l’article 2 de la loi de finances du 17 août 1855, et il est à propos de remarquer que cette disposition, qui valait la peine d’être discutée, a été enlevée par surprise. Le ministère ayant eu soin de la glisser dans la loi des recettes, elle fut votée, à la fin de la session, par un très-petit nombre de membres de la Chambre dont la plupart, il faut bien le dire, n’en avaient pas compris le premier mot. (E. D.)