Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/732

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de Limoges ; mais, par les précautions qu’on a prises, les progrès du mal se sont arrêtés, et il ne paraît pas qu’il se soit étendu. Le prix des bêtes à cornes a baissé sensiblement depuis quelque temps. Si cette baisse subsistait, elle ferait perdre au Limousin la seule ressource qui lui reste pour remplacer une faible partie des sommes immenses qui sont sorties l’année dernière de la province, et qui en sortiront encore cette année pour acheter des grains. Les bêtes à laine et les cochons ont essuyé l’année dernière, ainsi que les volailles, une très-grande mortalité ; elle continue encore sur les cochons, et c’est une perte d’autant plus funeste dans cette malheureuse année, que l’engrais de ces animaux est une des principales ressources des petits ménages de campagne.

VI. Vins et eaux-de-vie, — Les vignes ne sont un objet considérable que dans les élections d’Angoulême et de Brive ; elles forment surtout une des principales récoltes de l’Angoumois, où la vente des eaux-de-vie est presque la seule voie qui fasse rentrer dans la province l’argent qui en sort annuellement pour les impositions. L’année sera très-mauvaise en Angoumois, et cette mauvaise année vient à la suite de plusieurs autres très-médiocres. Cependant, comme les vins sont rares partout, il est à croire que le vin se vendra cher et dédommagera un peu les propriétaires, tant par le haut prix de ces vins, que par celui des anciennes eaux-de-vie qui peuvent encore leur rester. L’élection de Brive est plus malheureuse à cet égard que l’Angoumois : les vignes y ont encore plus mal réussi ; indépendamment du mal général, vingt paroisses du meilleur vignoble ont été entièrement ravagées par une grêle affreuse tombée le 3 septembre.

VII. Situation générale de la province. — L’Angoumois, qui fait à peu près le tiers de la généralité, sans être dans l’abondance, ne souffrira pas autant que l’année dernière. Sa production en froment a été assez bonne, de même que celle des blés d’Espagne, et les fèves, dont le peuple consomme beaucoup, y ont assez bien réussi. On a lieu de croire que, quoiqu’il ne reste rien des anciennes récoltes, et que celle-ci ait été par conséquent entamée au moment même de la moisson, les habitants auront de quoi subsister, d’autant plus que les deux provinces du Poitou et de la Saintonge qui l’avoisinent, et qui dans les meilleures années contribuent à l’approvisionner, ont elles-mêmes récolté beaucoup de froment. L’on croit, cependant,