Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/212

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Rouen à raison de dix-huit onces par livre, et au même prix que celui qui se fait dans l’intérieur, dont le poids n’est que de seize onces ; d’où il résulte que le droit de banalité augmente le prix d’un neuvième. Si des institutions aussi nuisibles à la subsistance de nos sujets, aussi contraires à tous les principes, sollicitent notre attention pour tous les lieux où elles existent, elles la méritent encore plus particulièrement dans notre ville de Rouen, que la nature a désignée, par les avantages de la plus heureuse position, pour devenir le chef-lieu d’un grand commerce, l’entrepôt le plus commode de l’importation des grains étrangers et de la circulation des grains nationaux, le centre d’où l’abondance, fixée dans la ville même et assurée à ses habitants, doit encore se répandre par la Seine vers notre bonne ville de Paris et les provinces de l’intérieur de notre royaume. Tel est le degré d’importance et de prospérité que la situation de notre ville de Rouen lui promet, et que sa police prohibitive actuelle ne lui permettrait jamais d’atteindre. Mais, en nous livrant au soin de réformer cette police, notre justice exige en même temps que nous nous occupions des moyens de pourvoir, soit à la liquidation et au remboursement des finances qu’on nous justifiera être légitimement dues sur les offices que nous avons résolu de supprimer, et au payement des dettes auxquelles ils pourraient être affectés, soit aux indemnités auxquelles l’abolition du droit de banalité pourrait justement donner lieu. À ces causes, etc., nous avons, par le présent édit, dit, statué et ordonné ce qui suit :

Art. I. Nous avons éteint et supprimé, éteignons et supprimons les cent offices de marchands de grains privilégiés, créés en notre ville de Rouen par édit du mois de décembre 1692, et les douze offices semblables créés par édit de juillet 1093 ; l’office de syndic desdits marchands, créé par édit du mois de décembre 1693 ; les deux offices d’auditeurs et examinateurs des comptes de ladite communauté, créés par édit de mars 1694 ; les deux offices de syndics créés par édit de novembre 1705, et les offices d’inspecteurs et contrôleurs créés par l’édit du mois de février 1745.

II. Les titulaires ou propriétaires desdits offices supprimés seront tenus, dans l’espace de six mois du jour de la publication du présent édit, de remettre entre les mains du sieur contrôleur-général de nos finances leurs titres de propriété, quittances de finance et autres titres justificatifs des sommes par eux payées, pour être procédé à la liquidation et ensuite au remboursement des finances légitimement dues, ainsi qu’il sera ordonné ; ensemble un état de leurs dettes, tant en rentes perpétuelles que viagères, pour être pourvu à l’acquittement, ainsi qu’il appartiendra.

III. Défendons expressément auxdits cent douze marchands de prétendre, après la publication de notre présent édit, aucun privilège ou droit exclusif,