Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/26

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gnes, et en payant dans chaque lieu une fileuse pour instruire celles qui ne savent point encore filer. Il faudrait encore se pourvoir des matières destinées à être filées, et s’arranger à cet effet avec des fabriques ou avec des négociants qui fourniraient ces matières et emploieraient ou vendraient le fil à leur profit. Pour faciliter l’introduction de cette industrie dans les cantons où elle est peu connue, M. l’intendant se propose d’envoyer chez ses subdélégués quelques modèles de rouets, d’après lesquels on pourra en faire. Il destinera aussi volontiers à cet objet une partie des fonds que le roi a bien voulu accorder pour faire travailler les pauvres. Au surplus, les personnes qui se chargeront de ce détail dans les villes ou dans les campagnes, sont invitées à informer des difficultés qu’elles pourraient rencontrer et des secours qu’elles croiraient nécessaires pour assurer le succès de cette opération, M. Desmarest, inspecteur des manufactures de la généralité, qui se fera un plaisir de leur faire passer directement, ou par la voie de MM. le subdélégués, les éclaircissements qui lui seront demandés. Il faudra que les lettres lui soient adressées sous le couvert de M. l’intendant.

Deuxième partie de l’article III. — De la nature et de la distribution des secours.

§ Ier. On peut pourvoir de deux manières à la subsistance des pauvres : ou par une contribution dont les fonds soient remis au bureau de charité pour être employés de la manière qu’il jugera la plus avantageuse, ou par une distribution des pauvres entre les personnes aisées, dont chacune se chargerait d’en nourrir un certain nombre, ainsi qu’il a été pratiqué plusieurs fois dans cette province.

§ II. Cette dernière méthode a quelques inconvénients. Un des plus grands paraît être le désagrément auquel s’exposent les personnes qui se chargent de nourrir ainsi les pauvres, d’avoir à essuyer les murmures de ces sortes de gens, qui sont quelquefois très-difficiles à contenter. Un bureau de charité leur en imposerait vraisemblablement davantage, et personne ne serait importuné de leurs plaintes, dont le peu de fondement serait connu. D’ailleurs, cette méthode de rassembler ainsi les pauvres pour ainsi dire à chaque porte ressemble trop à une espèce de mendicité autorisée. Il est plus avantageux que les secours leur soient donnés dans l’intérieur de chaque famille. Il paraît même qu’on ne peut guère soulager autrement ceux qui n’ont besoin que d’un supplément de