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Je me rendais en hiver de la rue du Bac à la Pitié, dès cinq heures du matin. La grande affaire pour moi était d’arriver avant la voiture qui prenait dans tous les hôpitaux de Paris les cadavres non réclamés. Je tenais à choisir mes sujets. Je préparais pour mes associés, le scalpel à la main, la leçon du jour. Nos études anatomiques duraient jusqu’à midi.

Vers une heure, nous allions respirer l’air plus pur du jardin des Plantes, tout en causant de botanique, d’anatomie comparée. Nous fûmes un jour requis pour collaborer à la dissection d’un éléphant mort de maladie.

Plus tard, mes matinées se passaient dans les hôpitaux. J’ai longtemps fait le service d’externe et d’interne à la Charité, dans les salles de chirurgie, sous M. Boyer, que nous appelions le père Boyer, et sous M. Roux ; dans les salles de médecine de Fouquier et de M. Chomel ; à l’hôpital Saint-Louis, dans les salles de Richerand et dans les salles de Biet, que je fus heureux de retrouver, quinze ans plus tard, à la table de M. Molé, ministre des affaires étrangères, dont il était le médecin. Je fis le service à l’hôpital des Enfants-Malades sous M. Guersant. J’ai suivi encore la clinique savante, animée, et les opérations si audacieuses du baron Dupuytren.

Enfin, j’ai tenu le service des Enfants-Trouvés avec Baron, qui fut sous la restauration médecin des enfants de France, et mort comme tant d’autres de notre temps. Tous les matins, le thermomètre en main, je mettais dans un bain de vapeur une quinzaine de nouveau-nés affectés d’endurcissement du tissu cellulaire, bain que