Page:Véron - Mémoires d’un bourgeois de Paris, tome 1.djvu/239

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est dans ma famille. Sans elle, je ne suis qu’un vieillard infirme, longtemps proscrit, réduit à mendier un asile ; mais par elle, ce proscrit est roi de France !… Je ne flétrirai pas par une lâcheté le nom que je porte et le peu de jours que j’ai à vivre !… Je sais ce que je dois à Votre Majesté pour la délivrance de mon peuple ; mais si un aussi grand service devait mettre à votre discrétion l’honneur de ma couronne, j’en appellerais à la France ou je retournerais en exil. »

L’empereur Alexandre n’opposa à ces belles paroles de Louis XVIII qu’un silence respectueux.

Cette journée se termina par un banquet. Le roi de France en fit les honneurs à tous les souverains étrangers. Le prince de Schwartzenberg, Blücher et d’autres généraux de la coalition y furent admis ; les cinq maréchaux qui étaient allés au-devant du lieutenant général du royaume y eurent aussi leur place. Ce jour-là, ils portaient la cocarde blanche.

Le lendemain, Louis XVIII se rendit à Saint-Ouen ; une députation du sénat lui fut enfin annoncée.

Le président du sénat ne parla guère que de la constitution.

« Vous savez mieux que nous que de telles institutions, si bien éprouvées chez un peuple voisin, donnent des appuis et non des barrières aux monarques amis des lois et pères des peuples. Oui, sire, la nation et le sénat, pleins de confiance dans les hautes lumières et les sentiments magnanimes de Votre Majesté, désirent avec elle que la France soit libre, pour que le roi soit puisssant… »

Louis XVIII se contenta de répondre qu’il était sensi-