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nous avons de l’esprit. — Je n’aime pas l’esprit, répondit sèchement M. de Marcellus : l’esprit a toujours quelque chose de satanique. »

Il se produisit, dès les premières années de la restauration, plus d’un prosateur au style jeune et vif, plein d’idées, nourri des orateurs, des poëtes de l’antiquité et des grands écrivains du dix-septième siècle.

Citons d’abord, par ordre de date, M. Malitourne. Il se jeta, dès 1820, dans les concours de l’Académie française. Il ne craignit pas d’aborder ce grand sujet de l’Éloquence de la tribune et du barreau ; il disputa le prix à un noble vieillard, ancien rival de Gerbier au barreau de Paris, conseiller d’État sous l’empire et sous la restauration, à M. Delamalle, qui avait composé sur cette matière tout un traité ex professo. M. Malitourne n’obtint que l’accessit. L’Académie avait également mentionné dans ce concours un autre nom jusque-là inconnu, celui de M. Charles Maguin, l’ingénieux critique et le savant bibliothécaire. *

Au concours suivant, le prix d’éloquence pour l’Éloge de Lesage fut partagé entre M. Patin et M. Malitourne. Dans ce concours académique, M. Saint-Marc Girardin obtint l’accessit, et M. Anays Bazin, l’historien de Louis XIII, que les lettres ont perdu récemment, obtint la première mention.

Les journaux s’emparèrent de la plume de M. Malitourne, et le monde et les affaires ne l’ont plus dès lors prêtée que rarement à la littérature.

M. Malitourne est surtout un séduisant causeur ; il devine les impressions de ceux qui l’écoutent, leurs pensées de la minute, et il vivifie en se jouant ces pensées,