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gien en chef adjoint, Dupuytren desirait vivement n’avoir personne devant lui, et que plus tard, chirurgien en chef, il ne voudra avoir personne derrière lui.

Vers la fin de 1811, Dupuytren fut nommé chirurgien en chef de l’IIôtel-Dieu.

Il y eut lieu de nommer un chirurgien en second. Un concours s’éleva entre Marjolin et Béclard : Marjolin l’emporta.

Le premier jour de son entrée à l’Hotel-Dieu, Marjolin était là dans une salle, confondu avec les élèves, attendant avec anxiété l’arrivée de Dupuytren. Dupuytren paraît, et au lieu de tendre la main à son collègue : « Monsieur, lui dit-il, prenez un tablier et suivez la visite. » Il y avait bien loin de l’intelligence de Marjolin au génie de Dupuytren. Marjolin, découragé, demanda et obtint du conseil d’administration des hospices un service à l’hôpital Beaujon ; comme chirurgien, il y fit bien peu parler de lui.

Dupuytren, pendant de longues années, régna seul à l’Hôtel-Dieu. Il donna un tel éclat à l’enseignement chirurgical de ce vaste hôpital, que tous les chirurgiens éminents du monde entier tenaient à honneur de venir assister à ses hautes et brillantes leçons. Son langage était clair, concis, simple. Il faisait preuve d’une mémoire prodigieuse. Je l’ai entendu dans une de ses leçons cliniques citer La Fontaine avec à-propos et sobriété.

La science ne possède que peu de travaux écrits de la main de Dupuytren. Ses leçons furent recueillies et publiées par un de ses élèves ; mais on n’y sent pas revivre la parole du maître.

Dupuytren, d’une taille élevée, aux lèvres bien des-