Page:Va toujours.djvu/23

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C’est cela qui me ferait plaisir à moi, je danserais à votre noce !

— Maman, appuya Zoé, arrangeons une rencontre fortuite. Nous allons tous aller aux Roseaux, puisque vos terres se justaposent. nous enverrons dans le jardin des voisines,, une balle... un volant... que sais-je, une chose que mon oncle devra aller chercher.

— On ne joue guère au ballon à mon âge.

— Pourquoi pas ? Il y a bien des vieilles dames qui, par hygiène, jouent aux grâces et dansent la polka.

— Allons toujours aux Roseaux, accepta René, on fera naître une occasion. Zoé tu auras une voilette de dentelles. que le vent emportera dans un de leurs arbres.

Tous riaient :

— Bravo René ! La belle occasion de montrer votre adresse, vous sauterez le talus, vous attraperez l’objet avec votre canne... mais quand on parle du soleil, on en voit les rayons, dit Mme Michel Semtel, en se levant pour aller à la fenêtre ouverte sur la place, juste en face l’entrée de côté de la cathédrale. Ou je me trompe fort ou voilà ces demoiselles qui traversent le Parvis.

René se dressa empressé :

— Juste ! Ma sœur, je me sauve, je vais trouver l’occasion de les saluer.

Il s’élança, prit, une fois dehors l’air d’un fîâneur, vit ces dames se diriger vers le sanctuaire. Alors il se glissa vite par une autre porte de façon à se trouver juste à temps pour sembler sortir quand entreraient les pieuses personnes et leur offrir l’eau bénite.

Zoé riait :

— Tel Faust devant Marguerite, mais il était rajeuni le vieux docteur de Goethe !

— Rajeuni par Méphisto... notre digne oncle à moins d’artifice et ferait ce me semble un très confortable époux, sanctionna gaiement Frédéric. Je suis l’adjoint du maire, je les marierais.

— Et moi, je donnerais le dîner de noces suivi d’un bal,, déclara Mme Semtel. Mes enfants, réjouissons-nous, la vie ne nous a pas épargné les peines jusqu’à ce jour. Dans ma jeunesse à moi, on ne voyait pas d’ici entrer à Saint-Maurice des cortèges de mariés, c’étaient des prisonniers nobles qu’on y entassait. Au lieu du son triomphant des orgues, les échos des voûtes grises répétaient des gémissements. Dieu soit loué aujourd’hui. Te Deum laudamus !

— Voilà mon oncle qui sort de la nef, il nous envoie de la main, un salut souriant.