Page:Valéry - Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, 1919.djvu/100

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monde s’en servant — nécessairement. Je crois également — peut-être est-ce beaucoup s’avancer ! — que la fameuse et séculaire question du plein et du vide peut se rattacher à la conscience ou à l’inconscience de cette logique imaginative. Une action à distance est une chose inimaginable. C’est par une abstraction que nous la déterminons. Dans notre esprit, une abstraction seule potest facere saltus. Newton lui-même, qui a donné leur forme analytique aux actions à distance, connaissait leur insuffisance explicative. Mais il était réservé à Faraday de retrouver dans la science physique la méthode de Léonard. Après les glorieux travaux mathématiques des Lagrange, des d’Alembert, des Laplace, des Ampère et de bien d’autres, il apporta des conceptions d’une hardiesse admirable, qui ne furent littéralement que le prolongement, par son imagination, des phénomènes observés ; et son imagination était si remarquablement lucide « que ses idées pouvaient s’exprimer sous la forme mathématique ordinaire et se comparer à celles des mathématiciens de profession ».[1] Les combinaisons régulières que forme la limaille autour des pôles de l’aimant furent, dans

  1. Clerk Maxwell, préface au Traité d’électricité et de magnétisme, trad. Seligmann-Lui.