Page:Valéry - Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, 1919.djvu/80

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doivent défaire et laisser à travers les feuillets bleuâtres de l’espace, l’épaisseur du cristal vague de l’espace.

Il reconstruit tous les édifices ; tous les modes de s’ajouter des matériaux les plus différents le tentent. Il jouit des choses distribuées dans les dimensions de l’espace ; des voussures, des charpentes, des domes tendus ; des galeries et des loges alignées ; des masses que retient en l’air leur poids dans des arcs ; des ricochets des ponts ; des profondeurs de la verdure des arbres s’éloignant dans une atmosphère où elle boit ; de la structure des vols migrateurs dont les triangles aigus vers le sud montrent une combinaison rudimentaire d’êtres vivants.

Il se joue, il s’enhardit, il traduit dans cet universel langage tous ses sentiments avec clarté. L’abondance de ses ressources métaphoriques le permet. Son goût de n’en pas finir avec ce que contient le plus léger fragment, le moindre éclat du monde lui renouvelle sa force et la cohésion de son être. Sa joie finit en décorations de fêtes, en inventions charmantes, et quand il rêvera de construire un homme volant, il le verra s’élever pour chercher de la neige à la cime des monts et revenir en épandre sur les pavés de la ville tout vibrants de chaleur, l’été. Son