Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/22

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branchage ou un paquet d’herbes que le courant, emporte, et qui a des aventures en route.

Au bout du chemin est une guinguette, avec un chapelet de pommes enfilées pour enseigne ; moyennant quelques sous, je bois du cidre qui a une belle couleur d’or et me pique un brin le nez.

Ah ! oui ! Sacré lâche !


Mais aussi, je n’ai pas eu de chance…

Par un hasard bourgeois, ce lycée est plein d’air et de lumière ; c’est un ancien couvent, à grands jardins et à grandes fenêtres ; il tombe dans les réfectoires des disques de soleil ; il entre dans les dortoirs, quand les croisées sont ouvertes, des échos de feuillage et des tressaillements de nature déjà rouillée par l’automne, avec des tons chauds de bronze et de cuivre.


Je n’ai pas déplu à ces collégiens, habitués à être surveillés par des novices à peine sortis des bancs, ou par de vieux pions à brisques, plus bêtes que des sergents de chambrée.

Ils m’ont accueilli un peu comme un officier d’irréguliers en détresse, que la mort de son père — un régulier à chevrons — a rappelé par hasard ; puis, j’ai mon auréole de Parisien. C’est assez pour que je ne sois pas haï par ce monde de jeunes prisonniers.

Mes collègues aussi m’ont trouvé bon garçon, quoique trop sobre, eux qui enferment leurs heures