Page:Van de Wiele - Miseres.djvu/11

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gauche, plus humble, comme honteux d’avoir absorbé tant de nourriture.

Les époux Looze, de leur côté, avaient peu à peu surmonté leur absurde stupéfaction : ils se rendaient compte de l’audace de cet intrus qui, tout d’un coup, sans crier gare, venait ainsi forcer leur porte et leur cœur.

Juste Herbos était un garçon jeune encore, mais chétif et blême ; maintenant qu’il ne mangeait plus, ses mains inactives se portaient continuellement à ses lèvres, d’un geste hésitant qui dénonçait un caractère mou, inférieur, sans ressort ; et quand ses yeux rencontraient ceux des autres convives, ils avaient un regard très tendre et très triste, tout chargé de reconnaissance. Il ne parlait pas ; il se tenait assis sur le bord de sa chaise, les jambes ramassées sous. lui, pour ne gêner personne.

À le voir dans une attitude si modeste, Mme Looze pressentit que celui-là était une créature faible et broyée ; brusquement, elle songea qu’il allait être une charge pour eux.

Elle alluma une bougie, elle le mena à la chambre qu’elle lui avait fait préparer tout en haut, dans les combles. Parvenue là, elle lui dit sèchement, d’un air délibéré :

— Vous savez que nous sommes loin d’être