Page:Van de Wiele - Miseres.djvu/16

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en quelques heures, il avait achevé une grosse de minuscules jeux de quilles, la même que Looze payait autrefois quatre et cinq francs en fabrique. Et, plus d’une fois, il arriva à ce dernier de dire, devant Herbos, en désignant à quelque acheteur d’importance, dont il souhaitait amplifier la facture, ces boîtes de hochets ou de figurines, œuvres du triste hère :

— Ça vient d’Allemagne ; c’est très avantageux… Article d’exportation !

Juste Herbos n’eut jamais l’idée de se rebeller, de demander un salaire, sa part de bénéfice sur ces marchandises créées par ses doigts, et dont on tirait argent. Un frisson le secouait rien qu’à la perspective d’être jeté à la porte, de se retrouver de nouveau, affamé et perdu, sans abri sous le ciel béant… Alors, terrorisé par cette affreuse vision, il acceptait tous les labeurs sans murmure, content des quelques pièces de monnaie que Looze lui mettait parfois dans la main, le dimanche. Il avait eu assez d’initiative pour se faire ouvrir cette maison et s’y ancrer : c’était le seul acte un peu énergique de sa vie. À présent, il était à bout ; le courage de s’affranchir lui manquait.

L’homme est un animal très vil et très cruel, né pour subir ou exercer l’oppression : comme