Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/206

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or et sur argent, des orfèvres, des ciseleurs, des émailleurs, s’unit à celui des peintres et des sculpteurs pour envelopper dans les dyptiques et les tryptiques toutes ces images odieuses à Constantinople, et si chères aux émigrants.

Reste maintenant l’invasion des Barbares, fait énorme dans la question de l’art, et le moins compris peut-être de tous ceux dont nous venons d’esquisser la rectification. Sans doute, ce débordement des peuples du Nord n’a pas pu s’opérer et ne peut se concevoir sans des actes atroces de brutalité et d’ignorance. Mais tout a sa mesure, et l’historien ne doit pas plus exagérer les catastrophes que les prospérités ; il n’est pas plus démontré, en effet, que l’invasion des Barbares ait été une calamité pour les arts et le goût, que pour le bonheur des peuples. La religion chrétienne ne voulait pas anéantir la société ; elle était venue seulement la transformer, en attaquer les vices, en amoindrir les maux et en étendre les bienfaits. Il était de la destinée des Barbares d’y concourir ; tout les y poussait : leurs intérêts, leurs passions, leurs mœurs même, aussi naïves que brutales. Les peuples de l’empire, écrasés sous le plus hideux esclavage, ruinés par les plus intolérables extorsions, les attendaient ou les appelaient avec espoir, quels que fussent les changements qu’ils devaient introduire. Le sensualisme inerte où croupissait l’empire avait besoin de ce remède violent ; sans l’invasion des Barbares, qui renouvelèrent le sang appauvri du corps social, on ne comprendrait pas sa conservation. En effet, le mal était