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MASACCIO DA SAN-GIOVANNI.

Redescendons au douzième siècle. Les intelligences subissent le despotisme du dogme religieux. L’imprudent qui s’aventurerait à attaquer la rigidité de ses préceptes, l’infaillibilité de ses règles, loin d’éveiller la sympathie, attirerait l’anathème sur sa tête. Les imaginations les plus brillantes, les esprits les plus énergiques, les individualités les plus puissantes, sont forcés de se renfermer dans le cercle tracé par l’Église. Pour elle, la tradition est un rempart que les plus téméraires, les plus audacieux, n’oseraient essayer de franchir. Les sciences, les lettres, les arts, lui obéissent humblement. Elle guide leurs élans, et les comprime, au besoin, pour les fondre dans une stricte unité. On n’obtient sa protection, on n’échappe à ses colères, qu’en acceptant le rude et étroit collier du servilisme. En un mot, l’Église est tout, l’homme n’est rien. Cet état d’inertie, d’abrutissement et d’abjection, ne pouvait durer toujours. Dieu a mis au cœur de l’homme une intarissable sève d’activité, d’indépendance et de fierté, qui ne se cache et ne se repose que pour se renouveler et se montrer ensuite plus limpide, plus abondante et plus impétueuse.

Un siècle s’est à peine écoulé, que déjà l’autorité de l’Église diminue, la foi s’ébranle, le doute se glisse dans les âmes, les illusions se dissipent, les rêves s’évanouissent. L’inquiétude, avant-courière des révolutions, l’inquiétude circule partout. L’immobilité a produit la souffrance : on veut du mouvement, mais on hésite encore, parce qu’on ne sait où aller, vers quel but se diriger. Maintenant, qu’un