Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

et fidèles, parce qu’ils sont sévèrement hiérarchisés, se tiennent chacun à son poste pour traduire exactement et exalter davantage tous les sentiments et toutes les affections fomentés par les croyances. Le profond sentiment d’inquiétude et d’effroi qui a transi ces peuples vous pénètre encore dans les labyrinthes souterrains de Milassa, d’Arabhisar, de Tchelminar, dans l’ancienne Persépolis, et sous les cavernes et les antres taillés dans les montagnes de l’Indostan, du Tangut et du Thibet. Incroyables excavations, vulves mystérieuses peuplées par les arts de fantômes de toutes sortes et d’apparitions surprenantes, et du sein desquelles l’humanité semble être sortie pour y rentrer un jour tout entière. Les espérances, les aspirations qui ont nourri l’imagination fiévreuse de ces peuples vous saisissent encore devant les Babels en spirales, devant les pagodes échelonnées sans terme les unes sur les autres, telles qu’on les voit à Bénarès, dans le Bihar, dans le Maduré et au fond de la péninsule. La contemplation, les extases, les rêves, le délire, les expiations, les tourments, les macérations et la patience, tout ce que ces peuples enfin ont reçu de leurs fortes religions, les arts le leur ont inculqué davantage, chacun suivant sa langue et ses ressources. Leur fastueuse et incohérente architecture, comme une autre poésie, a parlé la langue hyperbolique et obscure de leurs prêtres. La peinture et la sculpture, vouées ensemble par elle à toutes les allusions, à tous les caprices, à toutes les licences, à tous les excès de la pensée, se sont répandues en emblèmes et en énigmes indé-