Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/903

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berti fit des choses tellement prodigieuses, qu’on se refusait à en croire ses propres yeux. Il avait renfermé, dans une petite boîte, des peintures qu’il montrait par un petit trou pratiqué dans une des parois. On apercevait des montagnes dont les cimes se perdaient dans les nues, et de vastes provinces dont la mer baignait les rivages. Les campagnes s’étendaient si loin, qu’elles finissaient par échapper à la meilleure vue. Les savants et les ignorants se croyaient en présence de la nature et non d’une peinture. Alberti appelait ces choses des démonstrations (has res demonstrationes appellabat). Il y en avait de deux sortes, les unes diurnes, les autres nocturnes. Dans ces dernières brillaient Arturus, les Pléiades, Orion et d’autres corps lumineux. La lune s’élevait derrière les montagnes et on distinguait les étoiles qui précèdent l’aurore. Dans les démonstrations diurnes le soleil frappait de ses rayons tous les objets environnants. Alberti excita la plus vive admiration chez les hommes les plus distingués de la Grèce auxquels les moindres effets de la mer étaient connus. Lorsqu’ils eurent appliqué leur œil au trou de sa petite boîte, il leur demanda ce qu’ils voyaient. Eh ! répondirent-ils, nous voyons une flotte sur les ondes. Elle arrivera ici avant qu’il soit midi, si elle n’est arrêtée par l’horrible tempête que nous présagent les vagues écumeuses où se reflètent les ardents rayons du soleil. » En ajoutant à son procédé divers accessoires des spectacles mouvants, Alberti approcha de la réalité et rivalisa avec la na-