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phins, d’orques et d’autans. Ce dessin fut donné par Fabio, fils d’Antonio Segni, à Messer Giovanni Gaddi, avec cette épigraphe :


Pinxit Virgiiius Neptunum, pinxit Homerus,
    Dum maris undisoni per vada flectit equos.
Mente quidem vates illum conspexit uterque ;
    Vincius ast oculis jureque vincit eos.

Il lui prit fantaisie de peindre à l’huile une tête de Méduse ; des serpents qui se nouent et s’entrelacent de mille façons forment sa chevelure, invention la plus bizarre et la plus étrange qu’on puisse imaginer. Comme il fallait beaucoup de temps pour mener cette tête à fin, il la laissa inachevée, ainsi qu’il faisait presque toujours. On la trouve dans la précieuse collection du duc Cosme ; il possède encore de ce maître une figure d’ange, qui tient une main sur sa poitrine, tandis que l’autre, élevée et venant en avant, a permis à Léonard d’exécuter un admirable raccourci de l’épaule au coude.

C’est le cas de remarquer la manière particulière au Vinci. Pour donner à sa peinture un grand ressort, il employait les oppositions les plus fortes de la lumière et de l’ombre. Il aurait voulu obtenir et il cherchait, pour ses fonds, quelques tons plus sombres encore que le noir, afin de ménager plus d’éclat aux parties éclairées. Mais il lui arrivait que, prenant ainsi pour point de départ la teinte la plus vigoureuse, et s’efforçant de finir et de modeler le plus possible ses ouvrages, il les amenait à une localité sourde et privée de lumière, qui semblait rendre plutôt les effets de la nuit que ceux du jour.